Un autre calvaire commença pour Padre Pio, celui des très nombreuses visites médicales auxquelles il fut soumis pour vérifier la nature des blessures.
Le docteur Luigi Romanelli examina Padre Pio pendant 2 jours et produisit l'attestation suivante :
"J'ai la conviction, voire la certitude, que les blessures ne sont pas superficielles, parce qu'en appliquant le pouce sur la paume de la main et l'index sur le dos, et en exerçant une pression, on a la sensation précise d'un vide. À la poitrine, j'ai observé une coupure nette, parallèle aux côtes, de 7 ou 8 cm de long avec résection dans les parties molles".
En avril 1920, le Père Agostino Gemelli, médecin et psychologue, se rendit à San Giovanni Rotondo.
Il arriva au couvent le 18 avril 1920 pour examiner les plaies de Padre Pio, mais entre-temps le Saint-Siège, par l'entremise de la congrégation qu'on appelait le Saint-Office, avait décidé que personne ne pouvait examiner les blessures sans autorisation écrite.
Le Père Gemelli insista pour qu'on lui montre les plaies mais Padre Pio, obéissant à l'ordre du Vatican, lui répondit fermement qu'il n'était pas autorisé à le faire.
Quelques années plus tard, dans un article de la revue "Vita e Pensiero", le Père Gemelli jugeait tous les stigmatisés (sauf saint François d'Assise) comme de "possibles hystériques, dotés d'une spiritualité très pauvre".
L'opinion du Père Gemelli faisant autorité, a pu avoir influencé tous ceux qui se liguèrent contre Padre Pio à cause de ses stigmates, comme si celles-ci étaient le résultat de la mystification d'un névrotique ou l'œuvre d'un escroc.
De nombreux fidèles par lesquels il y avait des savants, des théologiens et des prélats, s'est opposé à ceux là.
Il y eut même des discordances entre les Papes.
Le Pape Benoît XV (1914-1922) estimait Padre Pio qu'il appelait "homme de Dieu", "un de ceux que Dieu envoie sur la terre de temps en temps pour convertir les hommes". Benoît XV avait bien accueilli les rapports enthousiastes de ses hommes de confiance, dont le premier fut l'archiatre pontifical.
Mais les ennemis ne lâchaient pas prise, notamment l'archevêque de Manfredonia, Monseigneur Pasquale Gagliardi.
Après le décès du pape, cet évêque et ceux qui le soutenaient ne laissèrent pas le temps à Pie IV (1922-1939), son successeur, de mener sa propre enquête et présentèrent au Saint Office des mémoriaux remplis d'accusations.
La première mesure disciplinaire prise par le Saint Office arriva.
Le 2 juin 1922 une lettre adressée au Supérieur général des Capucins interdisait à Padre Pio de se montrer en public et le sommait de changer de directeur spirituel. Ses supérieurs devaient songer à son transfert.
Ceux-ci l'avaient déjà envisagé 2 ans auparavant dans le but de freiner l'enthousiasme des foules pour Padre Pio.
Le 31 mai 1923, le Saint-Office intervint avec un décret dans lequel on niait le "caractère naturel des faits" concernant Padre Pio, et les fidèles devaient s'y conformer.
Le décret fut publié dans "L'Osservatore Romano".
Padre Pio n'ayant jamais été interrogé, voulut connaître les raisons de l'acharnement dont il était victime et demanda l'aide d'un ami, Giuseppe Orlando, prêtre, qui se rendit à Rome et fut reçu par le Saint-Office.
Don Giuseppe s'aperçut que la majorité des accusations mentionnaient un état de mystification et désobéissance, et sur son honneur, il les déclara fausses.
Le 24 juillet 1924, le Saint-Office émit un nouveau décret qui confirmait le précédent décret et exhortait les fidèles "à s'abstenir d'entretenir tout type de relation à caractère de dévotion, même épistolaire avec Padre Pio.
Padre Pio devint alors comme un prisonnier dans son couvent. Il ne descendait pas au parloir, n'écrivait pas de lettre, ne se montrait pas à la fenêtre, et célébrait la messe en privé.
Les frères durent repousser la foule, seuls certains médecins avaient un droit de visite.
En 1925, Padre Pio se fit opérer d'une hernie.
En 1927, on lui enleva un kyste au cou.
Après avoir déjà pleuré sa sœur Felicita morte en 1918 à l'âge de 29 ans, Padre Pio allait perdre sa mère dans cette période de détresse.
Sa mère vint à San Giovanni Rotondo pour le Noël 1928 et tomba malade. Padre Pio put rester à ses côtés et lui administrer les derniers sacrements.
Elle meurt le 3 janvier 1929 au matin.
Des comités se formèrent pour défendre Padre Pio.
Emmanuele Brunato, un ami fidèle de Padre Pio, épaulé par M. Morcaldi, le maire de San Giovanni Rotondo, utilisa tous les moyens possibles pour découvrir la vérité ce qu'il fit avec succès.
La vérité : tout partait de l'archevêque de Manfredonia, Monseigneur Pasquale Gagliardi, et de 3 prêtres de San Giovanni Rotondo : le chanoine Domenico Palladino, le chanoine Giovanni Miscio et l'archiprêtre Giuseppe Prencipe. Ceux-ci ayant une vie dissolue, Padre Pio représentait pour eux un reproche vivant et le jalousaient car il était vénéré comme un saint.
En menant son enquête, Emanuele Brunato découvrit des machinations et réussit à prouver la mauvaise foi de ces 3 prêtres, documents à l'appui.
Il eut un procès avec le chanoine Miscio et obtint sa condamnation à 20 mois de réclusion.
Il découvrit aussi que l'archevêque Gagliardi poussait les 3 prêtres et les protégeait.
Il partit ensuite pour Rome en juin 1925 avec une valise remplie de documents pour demander conseil à Don Orione. Celui-ci lui conseilla de faire des copies des documents et de les donner aux cardinaux les plus influents.
Il attendit en vain les nouvelles dispositions.
En 1926, il publia un livre explosif sous le pseudonyme de Giuseppe De Rossi. Le Saint-Office séquestra les exemplaires et les mit à l'index.
La situation commença à se débloquer.
Monseigneur Felice Bevilacqua du Vicariat de Rome, se rendit à San Giovanni Rotondo et certifia que les accusations retenues contre le clergé local étaient bien fondées et fit coalition avec Emanuele Brunatto.
Les amis de Padre Pio dirigés par Emanuele Brunatto passèrent aux menaces, on décida alors de destituer l'archevêque Gagliardi qui dut quitter le diocèse en septembre 1929.
Le maire de San Giovanni Rotondo, Francesco Morcaldi, écrivit un livre intitulé "Lettre ouverte à l'Église" qui inquiétait fortement le Vatican.
Cela fut défavorable à Padre Pio car le 23 mai 1931, un décret du Saint-Office priva Padre Pio de la faculté d'exercer son ministère sacerdotal excepté la sainte messe qu'il devait célébrer dans la chapelle interne du couvent sans la participation d'autrui.
M Morcaldi accepta alors de remettre au Saint Siège tous les exemplaires de son livre et toutes les pièces du dossier en échange d'engagements précis de la part d'un cardinal qui ne tint pas parole.
1) Emanuele Brunatto étant en colère, prépara un volume intitulé "Les antéchrists dans l'Église du Christ" qu'il publia à l'étranger en 3 langues au début de l'année 1933.
Le livre fut lu par des milliers de catholiques qui envoyèrent des lettres d'indignation à Rome.
2) Le livre du médecin Giorgio Festa, qui avait étudié les stigmates de Padre Pio sortit en Italie.
3) Un évêque capucin présenta au Pape un dossier contenant des témoignages de frères sur la vie sainte de Padre Pio.
Ces 3 évènements amenèrent Pie XI à restituer à Padre Pio le libre exercice de son ministère le 16 juillet 1933.
Le 16 juillet 1933 le Saint-Office l'autorise à nouveau à célébrer des messes et à entendre des confessions.
Les permissions lui furent accordées au fur et à mesure. Il put rapidement recommencer à célébrer la messe à l'église devant les fidèles, mais il dut attendre 8 mois avant de pouvoir confesser les hommes et encore 2 mois avant de pouvoir confesser les femmes.